Approches transformatrices de genre

Les interventions des membres de la COP sur les approches transformatrices de genre

 

Au cours de la conversation sur les approches transformatrices de genre, les membres de la communauté de pratique ont partagé leur point de vue sur l’ATG, les défis et les solutions pour appliquer des approches véritablement transformatrices pour lutter contre les MGF. La conversation avec les membres de la COP a suivi la même structure que la conversation sur les sessions du dialogue internationales des parties prenantes. Dans ce document, vous trouverez les points forts des discussions et un résumé des interactions des membres.

Pour comprendre pourquoi les approches visant à mettre fin aux MGF doivent être transformatrices de genre, il faut comprendre les concepts de base du genre et des normes de genre. 

Les normes de genre font référence aux règles informelles et aux attentes sociales partagées qui distinguent les comportements attendus sur la base du genre. Les normes de genre sont un sous-ensemble des normes sociales et sont souvent appelées normes sociales fondées sur le genre. Elles dictent la manière dont les hommes et les femmes doivent se comporter.UNICEF 2021 (e-module en anglais)

Les normes de genre sont basées sur des rôles et des attentes profondément ancrés qui régissent les comportements des différents genres, définissant ce que signifie être une femme, un homme, une fille ou un garçon dans une culture particulière. Elles sont spécifiques à un contexte social particulier et existent à un moment précis. Vous trouverez plus d’information et pistes d’actions dans cet article.

Un membre a fait remarquer qu’il était important d’avoir une approche holistique qui prend en considération les différents membres de la communauté, de faire en sorte que les communautés élaborent des stratégies innovantes à court, moyen et long termes pour l’amélioration de la communauté et de prioriser les actions menées par les femmes qui servent à remettre en question les normes et les stéréotypes de la société, et a également proposé d’impliquer les chefs religieux, car dans la plupart des cas, ce sont eux qui dirigent les communautés.

Il est généralement admis qu’une approche transformatrice en matière de genre doit aller plus loin que l’autonomisation des femmes et des filles et remettre réellement en question l’ordre social qui conduit à l’inégalité des genres. Cet article résume les défis qui ont été identifiés par les participant.e.s des groupes de travail lors du dialogue.

Tout en discutant des défis, les membres de la CoP ont partagé quelques réflexions sur leurs expériences de travail. Une membre travaillant avec le GAMS Belgique nous a partagé le déroulement d’une discussion de groupe sur les MGF avec des hommes. Elle a mentionné que beaucoup étaient disposés à dénoncer les MGF et pouvaient dire sans détour à quel point elles sont nocives pour les filles et les femmes ainsi que leur potentiel d’affecter d’autres membres de la famille. Cependant, lorsque la discussion s’est déplacée vers les normes de genre en général, ils ont fait une distinction claire entre les valeurs féminines et masculines. Ils semblaient avoir une vision assez figée de ce que représente une bonne femme et ce qu’ils considèrent comme les valeurs d’une bonne femme au point qu’ils n’étaient pas disposés à en démordre. Comme stratégie, ils ont décidé d’aborder l’aspect des masculinités et ses normes sociales ainsi que les valeurs données aux hommes. Ils ont mentionné des choses comme être un exemple pour les autres, être fort, ne pas pleurer et bien plus encore. Ils ont tous conclu que certaines de ces attentes étaient toxiques et nocives. En fin de compte, ils sont revenus sur la façon dont les inégalités de genre, les pratiques et les normes en général nuisent aux femmes et aux filles. Après avoir animé la session, l’équipe a remarqué que donner aux hommes du temps et de l’espace pour réfléchir à leur propre souffrance les rendait plus conscients des autres problèmes d’inégalités existantes et facilitait la discussion à leur sujet.

La doctorante Maria Väkiparta a partagé son étude de doctorat qui a exploré comment les hommes interrogés construisent discursivement des connaissances et des croyances sur le genre. Elle a trouvé qu’ils emploient le « discours de la différence hiérarchique » et le « discours de la responsabilité masculine » pour contester certaines formes de violence à l’égard des femmes (par exemple l’excision pharaonique), tout en légitimant d’autres (par exemple l’excision sunnah) et pour reproduire l’ordre patriarcal de genre. Cependant, il y avait aussi des signes que les hommes renégociaient certains éléments des normes de genre en vigueur.

Selon Maria, le discours sur la responsabilité masculine justifie la supériorité des hommes par les responsabilités substantielles qu’ils ont envers leur nation et leur famille. Le fait de souligner le rôle primordial des hommes en tant que soutiens de famille, de les considérer comme des ” leaders naturels ” et de représenter la campagne contre les MGF comme une responsabilité à la fois masculine et professionnelle est fortement aligné sur la ” virilité somalienne ” idéalisée qui met l’accent sur la responsabilité, la protection et le soin de la famille et du pays.

‘’Mon analyse critique des discours utilisés par les militants masculins contre les MGF révèle comment la subordination des femmes est discursivement justifiée, normalisée et (re)produite de nombreuses manières, y compris par les personnes qui s’opposent passionnément aux MGF. Ceci est problématique, car les MGF se produisent à cause des structures, des croyances et des valeurs patriarcales.’’

Selon Maria, les MGF doivent être abordées comme un symptôme de l’inégalité de genre et de l’oppression, et non (uniquement) comme un facteur contribuant aux problèmes de santé des femmes. Le travail de déconstruction de la supériorité des hommes peut se faire, par exemple, en aidant les communautés à développer une conscience critique des constructions concernant ce qui est “naturel” et “normal”.

La conversation sur les défis a légèrement changé de voie lorsque les membres ont commencé à revisiter le choix des mots utilisés lors de la présentation de la recherche ou des campagnes de plaidoyer. Réagissant au message de Maria, certain.e.s membres ont suggéré de dissocier la religion des MGF, car aucun texte religieux ne justifie les MGF. Par exemple, la discussion s’est focalisée pendant un certain temps sur l’utilisation du mot « Sunnah »

‘’Dire que la pratique est sunnah, c’est la légitimer comme islamique. Nous n’avons pas à cocher cette case. Nous n’avons pas à lier cette pratique à l’Islam’’. Maryan Abdikadir 

Sur le même thème, un membre a mentionné qu’il y a plus de 50 pays à population islamique, les MGF sont pratiquées dans plus ou moins un tiers. Il vient d’un pays musulman où les MGF n’existent pas. Il a souligné que les MGF sont une pratique néfaste et que ce n’est pas un mandat religieux. Les musulmans en Somalie en pratiquent, les chrétiens au Kenya en pratiquent ainsi que les juifs éthiopiens.

 

Julia Lehmann a expliqué qu’il s’agit d’une pratique enracinée dans le patriarcat et l’islam, le christianisme et le judaïsme, ainsi que les églises et les institutions religieuses qui défendent ces grandes religions et qui sont fondamentalement patriarcales. Pour cette raison, de nombreuses personnes associent la pratique à ces religions. Les religions promeuvent fortement bon nombre des mêmes valeurs qui sont également à l’origine des MGF, par exemple la valeur de la virginité féminine et l’idée que l’honneur de toute la famille dépend du comportement sexuel d’une jeune fille.

 

‘’Si nous disons que mettre fin aux MGF nécessite de remettre en question les normes de genre fondamentales dans lesquelles elles sont enracinées, il sera difficile à le  faire sans remettre également en cause bon nombre des valeurs fondamentales (présumées) promues par les différentes religions. Je pense qu’en arguant simplement que les MGF ne sont pas exigées ou même encouragées par la religion, nous n’abordons pas le vrai problème’’.

 Les membres ont convenu qu’il est important de discuter des approches transformatrices en matière de genre en relation avec les MGF. La discussion doit inclure une analyse plus approfondie du rôle de la religion dans la promotion de la pratique, mais éviter certaines terminologies telles que la Sunnah en référence aux MGF, car cela pourrait rendre la lutte contre les MGF encore plus complexe puisqu’elle n’offrirait pas de solution pour y mettre fin.

De nombreuses ressources ont été partagées par les membres au cours de cette discussion telles que cette recherche de Girl Not Brides sur l’engagement des chefs religieux pour mettre fin au mariage des enfants, ce qui peut également être pratique pour les MGF.

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