Dans beaucoup de sociétés, la santé mentale n’est toujours pas abordée ouvertement et est encore grandement stigmatisée. Sur la majorité du continent africain, les opinions sur la santé mentale sont toujours fermement influencées par des croyances traditionnelles (Venoranda R., 2020). Il arrive aussi simplement qu’on ne lui accorde aucune importance. En conséquence, il n’est demandé de l’aide que tardivement pour des problèmes psychologiques, ce qui à tendance à davantage les aggraver .
Dans un éditorial, Venoranda Rebecca Kuboka explique que les adolescentes et jeunes femmes peinent à trouver de l’aide quand elles sont confrontées à des situations traumatiques (Peyton N., 2019). Les récits culturels suggèrent d’ignorer les expériences terrifiantes et d’aller de l’avant. En conséquence, la peur, la honte, la stigmatisation et la victimisation associées à leurs expériences viennent nourrir une souffrance silencieuse. Elle souligne que l’engagement du Kenya à éradiquer les MGF en 2022, s’accompagne d’un besoin de se concentrer sur la provision de soutien psychosocial aux survivantes de MGF.
Des survivantes de MGF africaines ont plaidé en faveur du développement de services de santé mentale (Smith H. & Stein K., 2017), cela constituant leur plus grand besoin, et ont incité les gouvernements et associations caritatives à apporter du soutien pour gérer leur traumatisme de long- terme.
“Nous n’avons pas de services de santé mentale pour les survivantes de MGF -c’est un grand manque en Afrique” fait valoir Virginie Lekumoisa, une survivante kenyane.
Elles avancent que si davantage de survivantes reçoivent un soutien en santé mentale, elles pourraient avoir davantage de force pour parler et se faire entendre afin d’œuvrer à la fin de la pratique.
Les approches thérapeutiques abordées jusqu’ici sont issues du travail de psychothérapeutes européen.ne.s car peu de prises en charge psychologiques sont mises à disposition des femmes excisées en Afrique notamment. Néanmoins, Helen Smith et Karin Stein (Gberie, L., 2016; Sankoh O., 2018) présentent dans un article en 2017 l’exemple de services d’assistance au Somaliland assurés par des sages-femmes, elles-mêmes concernées par les MGF, et donc plus à même de comprendre le vécu des femmes, de les conseiller et partager leur propre expérience. Si elles constatent que les femmes développent des mécanismes de défense comme le recours à la religion, aux activités religieuses, se confier à des ami.e.s, beaucoup de femmes ne demandent pas d’aide. La pauvreté, le manque d’accès aux services pour des raisons techniques, monétaires, par crainte, par honte de parler … les poussent à cacher leurs problèmes.
Par ailleurs, le développement des structures de santé mentale et d’accompagnement psychologique en Afrique est très faible et ne permet pas d’assurer un suivi adéquat des personnes souffrant de pathologies psychologiques comme en atteste notamment The Lancet (20 ; 22). En effet, le budget y étant consacré est très faible, peinant à atteindre 1 % contre une moyenne de 6 à 12% en Europe et Amérique du Nord, et les praticien.ne.s sont rares, concentré.e.s en villes, difficilement accessibles pour les populations. La psychiatrie souffre encore d’importants préjugés et reste associée à la folie, les troubles associés perçus comme surnaturels se traiteraient par des interventions de médecine traditionnelle ou spirituelle.