Les organisations défendant les droits des filles et des femmes sont sous-financées, mais pas seulement. Les crises actuelles, telles que la COVID-19 et la guerre en Ukraine, ne résolvent aucunement les défis que doivent surmonter ces organisations.
Dans un contexte de crises mondiales, où les formes traditionnelles d’aide au développement et de subsides institutionnels sont très sollicitées, les financements innovants ou alternatifs apparaissent comme une solution complémentaire pour générer des sources de financements durables au service des ODD. Ces fonds durables permettront notamment la mesure de l’impact réel des programmes élaborés et des actions de terrains sur le long terme. Une des formes sous laquelle s’articule ces financements nouveaux est le partenariat. Puisque la raison d’être de ces financements innovants est la solidarité, la collaboration entre organisations s’inscrit tout naturellement dans ses modalités comme stratégie de mobilisation de fonds.
Nous avons pu constater qu’une des causes des difficultés d’accès au financement des organisations qui travaillent à l’éradication des MGF est leur taille modeste (petites et moyennes organisations avec des ressources humaines, … limitées). De ce fait, ce sont donc les grandes organisations internationales et nationales qui ont tendance à répondre aux exigences et bénéficient ainsi des subsides des bailleurs de fonds et donateurs.
Pour éviter la concurrence entre petites, moyennes et grandes organisations dans la recherche de financements, une stratégie innovante serait de mettre en commun les efforts de ces acteurs et actrices indépendamment de leurs tailles. Le travail en collectif, en partenariat ou en consortium, … se révèle être un excellent moyen pour renforcer mutuellement les capacités, unir les ressources, de mobiliser plus de fonds et s’accompagner dans des projets de plus grande envergure pour l’éradication des MGF est une des solutions pour combler les lacunes organisationnelles auxquelles les petites organisations font face. Agir en consortium, en collaboration, partenariat entre organisations de tailles diverses (grandes, moyennes et petites) permet non seulement d’unir nos forces et de combler les manquements des uns et des autres, mais surtout, de ne laisser aucun effort en marge de l’activité de terrain.
Les forces du travail en partenariats entre acteurs et actrices de terrain
Le travail en partenariats entre plusieurs acteurs et actrices se révèle être une stratégie gagnante et traduit l’envie de faire du lien entre les organisations et est plutôt encouragé par les bailleurs, et donateurs. En effet, depuis quelques années, on constate une émergence d’enjeux globaux et d’un agenda universel autour des MGF ce qui pousse à construire des objectifs communs entre les acteurs et actrices au niveau local, national et international. Cette configuration permet ainsi aux acteurs et actrices de se positionner ensemble comme des acteurs de changement.
- Le travail en partenariat est une exigence de plus en plus attendue des bailleurs et donateurs. Dans plusieurs pays, les financements publics et privés sont de plus en plus attentifs aux demandes de subventions portées par plusieurs acteurs et actrices de terrain autour d’un projet. Les bailleurs et donateurs publics et privés accordent une importance de plus en plus grande aux dynamiques collectives au sein de la société civile. Cela illustre la nécessité croissante pour ceux-ci d’être « en lien » (notamment grâce à de nouveaux outils d’information et de communication) et place les partenariats au centre des stratégies des organisations. En Belgique par exemple, les bailleurs publics (le gouvernement) invitent de plus en plus les organisations à travailler en collectif (minimum 3 organisations par collectif). La création des Collectifs vise à mutualiser l’expertise du secteur de la société civile. Ces collectifs sont invités à concevoir un plan d’actions sur 5 ans ayant pour objectif de répondre à une ou plusieurs priorités nationales sur la question des droits des femmes comme les MGF et les mariages forcés par exemple.
- Le partenariat entre acteurs et actrices de terrain permet le renforcement de capacités et bien plus encore.
« Renforcement de capacités » et « partenariat » ne sont pas équivalents, même si renforcer les capacités est souvent au cœur des objectifs du partenariat. L’objectif du renforcement des capacités est généralement l’autonomie du partenaire et l’objectif du partenariat quant à lui est généralement la mise en place d’une relation réciproque. Il ne faut donc pas que le rôle de « renforceur » de capacité vienne biaiser la relation partenariale. Une tension pourrait émerger : les acteurs et actrices de terrain souhaitent des relations réciproques, Pour échapper à cette tension, certaines ONG proposent une collaboration basée sur la réciprocité. Dès lors l’enjeu est de savoir comment installer cette réciprocité.
Plusieurs pistes et plusieurs mises en garde sont proposées aujourd’hui. Les ONG font souvent le constat que les relations partenariales restent déséquilibrées dans l’accès aux ressources financières, dans la définition des rôles et des responsabilités, dans la construction des projets, dans l’échange d’expertises, etc. L’une des raisons fondamentales de ce déséquilibre est la position de leader contractuel qui peut conforter « l’organisation leader » du consortium, partenariat dans des démarches qui laissent peu de place à la co-construction intégrant pleinement l’expérience des organisations locales, leurs connaissances des besoins et des aspirations des communautés (Coordination Sud, 2017).
Ce déséquilibre dans les relations partenariales se voit aussi dans la nature du dialogue engagé entre « l’organisation leader » du partenariat, consortium (qui est souvent la plus grande en termes de taille, ressources, … ) et ses partenaires. Le défi auquel seront confrontés les acteurs et actrices de terrain est donc de parvenir à exprimer aux partenaires ses propres attentes et ses propres contraintes. Plus largement, il s’agit de repenser cette relation contractuelle pour mieux installer une logique de co-construction de participation et de mise en œuvre collective. Les acteurs et actrices de terrain qui mènent des actions de terrain sur les MGF pourraient mettre en place des modes de collaboration mutuellement bénéfiques pour obtenir un impact à long terme.
- Le partenariat entre acteurs et actrices de terrain va au-delà du cadre du projet et du temps du projet
Comme mentionné plus haut, le travail en partenariat ou en consortium, collectif devient de plus un élément important des stratégies institutionnelles, on va vu le cas de Belgique plus haut. Le travail en partenariat cherche à dépasser la logique d’un « projet ». C’est dans ce sens que le travail partenariat entre différents acteurs et actrices devient « stratégique ».
Sous cet angle, le partenariat serait le reflet de l’évolution des pratiques d’intervention des acteurs et actrices de terrain qui mènent des actions sur les MGF, vers des interventions plus longues avec des objectifs d’influence et de changement social plus marqués (Coordination Sud, 2017)
- Le travail en partenariat comme stratégie pour une plus grande mobilisation des fonds auprès de bailleurs et donateurs
Le passage à une formule de partenariat plus collectif permet de reconnaître à une diversité d’acteurs et d’actrices des rôles complémentaires, sur un même thème comme les MGF par exemple ou sur un même territoire, et d’identifier collectivement les responsabilités de chacun pour porter ensemble le changement social. Une telle approche est donc souvent porteuse d’une ambition de changement plus global et plus durable à laquelle plusieurs donateurs et bailleurs notamment le secteur privé, les fondations et les particuliers souscrivent et y investissent.
Cette Stratégie en matière de partenariat et de mobilisation de fonds auprès du secteur privé et une Coopération avec le secteur privé, les fondations et les particuliers en faveur de la réalisation de l’objectif de l’éradication des MGF se fait dans d’autres secteurs c’est le cas du Programme Alimentaire Mondial dont la stratégie pourrait inspirer les acteurs et actrices de terrain qui travaillent pour mettre fin aux MGF.
La collaboration entre de grandes et de plus modestes organisations semblent ainsi constituer une approche convaincante pour mobiliser d’autres sources de financement auquel les acteurs et actrices de terrain qui travaillent pour mettre fin aux MGF à savoir : le secteur privé (les entreprises), les fondations privées et les particuliers.